Document de travail pour la Commission sur les minima sociaux élargie du 15 avril 2000. Bruxelles.

Préparé par Marie-Paule Connan et Prédrag Grcic.

 

Introduction aux propositions de fixation d'une revendication européenne pour un revenu garanti individuel

(Le seuil en dessous duquel il n'est pas acceptable de descendre dans une société européenne en pleine croissance qui doit permettre à tous et toutes de vivre dans la dignité, sans aucune discrimination d'âge, de sexe, d'origine, ou de tout autre type).

 

Le plein emploi n'est pas la panacée, lorsqu'il se réalise par la multiplication des emplois précaires, à bas et très bas salaires.
La courbe du chômage baisse et on se congratule dans les sphères dirigeantes. Les chômeurs ont du accepter massivement des emplois précaires et à très bas salaires. Ces efforts exigés sont inacceptables dans une Union européenne en pleine croissance. Pernicieusement, une frange de plus en plus importante de la population est entraînée dans une spirale de l'appauvrissement alors qu'une autre frange s'enrichit de plus en plus facilement. L'écart se creuse entre les riches et les pauvres.

Depuis le Sommet d'Amsterdam et la révision du Traité de l'Union européenne, on a tiré des deux côtés (patronat et gouvernements) sur les conditions de travail et ce ; au nom des politiques de l'emploi et de la lutte contre l'exclusion sociale.

Des mécanismes ont été mis au point dont on peut, aujourd'hui, mesurer les effets :

Les mécanismes législatifs :

  1. Un chapitre pour l'emploi dans le Traité d'Amsterdam qui exige la compatibilité des mesures pour l'emploi avec celles des grandes orientations de politiques économiques
  2. Des grandes orientations de politiques économiques (GOPE) définies chaque année et fondées sur la stratégie suivante (dénoncée par les Marches européennes dès 1998) : « Pour obtenir les résultats voulus, un élargissement de l'échelle de salaires vers le bas suppose une réduction de 20 à 30% du coût salarial des activités peu qualifiées, comme cela a été le cas par exemple, aux Etats unis dans les années 1970 et 1980. En outre, pour être efficace, une telle mesure nécessiterait en Europe, une réduction équivalente des allocations de chômage et des prestations sociales afin d'éviter « le piège de la pauvreté ».[Croissance et emploi dans le cadre de la stabilité de l'UEM. Réflexion politique en vue des grandes orientations de politiques économiques de 1998.(COM 103. 25/12/98)]
  3. Un processus lancé à Luxembourg, qui trace les Lignes directrices pour l'emploi présentées chaque année et focalisées sur l'inemployabilité des chômeurs, l'inadaptabilité des travailleurs et la coopération des partenaires sociaux.
  4. La privatisation des services publics.
  5. Le soutien financier à la création d'entreprises sans conditions contraignantes sur la nature et la stabilité des emplois créés.
  6. Le détricotage des systèmes de protection sociale, au nom de leur modernisation.
  7. L'unanimité imposée aux décisions importantes à prendre dans le domaine fiscal et social. Un seul Etat peut tout bloquer, et là où il y a unanimité, le Parlement européen n'a pas de pouvoir de codécision. Tout ce qui concerne le marché et l'Union Economique et Monétaire étant décidé à la majorité qualifiée.

 

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Les mécanismes structurels :
  1. Après avoir décrété l'inemployabilité des chômeurs, insisté sur leur responsabilité et les avoir culpabilisés ; l'accent est mis sur leur état « déstructuré » après plusieurs mois de chômage. Il en est déduit que « lorsqu'ils sont remis au travail, ils sont moins productifs » et cela justifie de ne pas les payer au tarif fixé par les conventions collectives. D'où la manne des mesures prises sans scrupules pour l'activation des allocations de chômage et la réduction des coûts de travail pour les personnes les moins qualifiées. Les employeurs sont récompensés, (subventionnés ou exemptés de charges sociales) lorsqu'ils « offrent » des emplois à ces chômeurs taxés de « déstructuration ». Des sous-statuts sont inventés et mis à la disposition des collectivités locales et des associations. Le travail précaire, partiel et à très bas salaire est encouragé par la multiplication des dispositifs « ciblés ». Les exemples sont pris dans les mesures inventées pour les handicapés physiques. Des experts sont amenés à définir le concept de chômeur-handicapé social.
  2. Les allocations de chômage sont de plus en plus « conditionnelles ». Des dispositifs de contrôle de plus en plus sévères sur la vie privée des chômeurs sont appliqués. Des obligations limitent les droits. La notion d'emploi « convenable » ou acceptable » est révisée. On se dit étonné qu'il y ait tant de chômeurs surendettés. On en conclut qu'ils ne savent pas gérer leur budget et on leur impose des formations pour la gestion de leur revenu de misère !
  3. Les experts des politiques sociales se réunissent beaucoup mais ne se mettent pas d'accord sur la définition du seuil de pauvreté. (Référence au revenu moyen ? Référence au revenu médian ? Quelle équivalence ? Quelle parité du pouvoir d'achat ? Quel pourcentage ? Quel est le seuil de tolérance ?).Pendant ce temps là, d'autres démontrent l'ingéniosité des plus pauvres à survivre et à supporter ce qu'à d'autres époques on considérait comme « intolérable ».

Les effets de ces mécanismes législatifs et structurels :

  1. De plus en plus de ménages de l'Union européenne subissent des baisses de revenus et des situations de surendettement.
  2. Les offres d'emplois augmentent, mais les emplois offerts sont très précaires et à très bas salaires, exigent une flexibilité qui implique des problèmes de gardes d'enfants et obligent à la mobilité.
  3. Les bas salaires augmentent de manière impressionnante en nombre.
  4. La baisse des indemnisations du chômage entraîne de fait la baisse des salaires.
  5. La précarité du travail s'intensifie.
  6. Les emplois à temps partiel et à durée déterminée n'assurent pas un revenu suffisant pour vivre décemment.
  7. La législation du travail subit des modifications importantes
  8. La qualification est de moins en moins une garantie contre le chômage et la précarité.
  9. Face à l'évolution des très bas salaires, les Etats avancent des mesures compensatoires qui ont un coût considérable. Ainsi le patronat fait-il passer le coût du travail sur le budget de l'Etat.
  10. Par l'exemption des charges sociales accordées au patronat et aux salariés (dans certains pays), les financements de la protection sociale sont mis en danger. (Quid des allocations de chômage, des soins de santé et des pensions de retraite pour la décennie à venir ?)

Des digues doivent être construites d'urgence pour éviter à un nombre de plus en plus important d'habitants de l'Union européenne d'être entraîné dans cette spirale de la précarité et de l'appauvrissement.
Ces digues sont définies, pays par pays, en relation avec la richesse de chaque pays, selon des principes et des valeurs communes en Europe :

  1. Le principe de convergence vers le haut qui est un des fondements de la construction européenne ne peut être remis en cause.
  2. La reconnaissance du lien direct entre la situation de rémunération de sans emploi et la valeur du travail. Ce lien ne doit pas être exploité au nom de la compétitivité. Il doit être pris en compte comme un élément essentiel du bien-être général de la société.
  3. Les digues de revenu garanti individuel - qui sont le seuil en dessous duquel, il n'est pas acceptable de descendre - impliquent deux autres digues : celle du salaire minimum et celle des pensions de retraite.
  4. Les conclusions du Sommet de Lisbonne des Chefs d'Etat et de gouvernement et leur orientation vers une « économie en ligne » prévoyant un risque supplémentaire d'aggravation des inégalités sociales implique de prendre des mesures immédiates sur les niveaux de revenu et l'accès aux nouvelles technologies de l'information.


Les 6 pages qui suivent (et l'introduction) sont soumises à la discussion des membres de la Commission minima sociaux. Les trois premières pages présentent les données transmises par les coordinations nationales des Marches européennes. Les trois pages suivantes proposent en trois tableaux une méthode de calcul pour aboutir à une revendication européenne.
Le tableau 1 met en parallèle les données statistiques européennes à disposition(PIB, seuil de pauvreté, seuil des bas salaires, salaires minimum, minima sociaux appliqués dans les Etats membres de l'U.E.) avec les revendications transmises.
Le tableau 2 présente une hypothèse d'augmentation de l'existant à partir d'un pourcentage du P.I.B.
Le tableau 3 simule un récapitulatif d'une revendication européenne immédiate. La dernière colonne reprend les revendications énoncées dans les documents des coordinations européennes.

Dans les annexes sont regroupées :
Les documents transmis par les coordinations nationales (en annexe1) et les données statistiques à notre disposition. Celles-ci sont en français pour la plupart mais un bon nombre de documents sont disponibles dans toutes les langues de l'Union. Le plus simple pour se les procurer est souvent de passer par les représentations permanentes de la Commission européenne pour chaque pays.
Dans l'Annexe 2 l'on trouvera le document Eurostat sur les seuils de pauvreté. Les données étant en Parité de pouvoir d'achat, nous avons fait un calcul en Euros. Le tableau est présenté en première page de l'annexe 2.
Dans l'annexe 3, le document concerne les seuils de bas salaire.
Toutes les données sur le PIB sont en annexe 4, ainsi que le mode de calcul du PIB 98 qui tient compte de la croissance (en dernière page).

Malgré tous nos efforts, il est possible qu'il y ait des erreurs. Si vous les constatez, merci de nous les indiquer. (Tel/Fax MPC : 322 230 50 24. e-mail predrag.grcic@freebel.net)

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